venerdì 8 febbraio 2013

TRÉSOR – « L’Origine du monde » aurait un visage


... et il serait irlandais. Paris-Match publie une "exclusivité mondiale" dans son édition du 7 février : la femme peinte par Gustave Courbet dans le sulfureux tableau L'Origine du monde, exposé au Musée d'Orsay depuis 1995, a été identifiée. Elle serait irlandaise et s'appellerait Joanna Hiffernan, ce que les spécialistes soupçonnaient déjà. Mais, surtout, une autre toile compléterait le tableau, permettant d'analyser sous une autre lumière cette audacieuse contre-plongée sur un sexe de femme.
Cette révélation a fait l'objet d'une longue quête. En 2010, un amateur d'art acquiert pour 1 400 euros chez un antiquaire parisien un tableau non signé montrant le visage d'une femme, bouche entrouverte, dans une pose lascive. L'œuvre, peinte à l'huile sur toile de lin, aux dimensions de 33 × 41 cm, est peinte en contre-plongée. Son acquéreur soupçonne qu'il s'agit d'une toile de maître et se met à la recherche de son auteur. En étudiant le tableau, l'amateur découvre que la toile a manifestement été découpée, extraite d'une peinture plus grande, raconte Paris-Match. Au verso de la toile, un cachet à demi effacé lui permet d'identifier le marchand d'art qui l'aurait acquise dans les années 1860. L'acquéreur consulte la Compagnie nationale des experts spécialisés en œuvres d'art, qui reconnaît dans le tracé, les couleurs et les choix esthétiques une œuvre de Courbet.
Le passionné d'art se lance dans une documentation précise sur les autres tableaux de Courbet quand il soupçonne que sa belle lascive serait en fait une autre partie du tableau L'Origine du monde. Ses couleurs et ses proportions semblent en effet correspondre parfaitement, comme si le visage en était le prolongement.

"Tableautins"
L'Origine du monde est un mystérieux tableau, sans signature, dont on sait seulement qu'il appartint au diplomate ottoman Khalil-Bey, qui l'aurait maintenu caché derrière un rideau vert pendant des années, le dévoilant seulement à ses visiteurs d'exception. Le témoignage d'un ami de Courbet, Jules Troubat, intrigue l'enquêteur amateur. Evoquant la visite de Khalil-Bey à l'atelier du peintre, Jules Troubat écrit en effet : "Il en résulta une série de tableaux et tableautins qui se cachent dans quelques musées secrets d'Europe ou d'Amérique."  Cette indication de "séries de tableautins" fait alors soupçonner à l'amateur que L'Origine du monderésulte d'un plus grand tableau qui aurait été morcelé.
Une autre toile de Courbet, La Femme au perroquet, exposée au Metropolitan Museum of Art à New York, le met sur la piste de l'Irlandaise Joanna Hiffernan, compagne du peintre James Whistler, qui l'avait présentée à Courbet et pour qui elle aurait posé à plusieurs reprises.

L'amateur s'adresse alors à l'expert Jean-Jacques Fernier, de l'Institut Gustave-Courbet, auteur du Catalogue raisonné de l'œuvre du peintre. L'expert procède à une analyse fine du tableau du visage, avec le concours du Centre d'analyses et de recherche en art et archéologie : "Radiographies, rayons X, spectrométrie infrarouge, chromatographies", poursuit Paris-Match. "Les pigments, la couche brune des contours, le tissu de la toile de lin, composé de 14 × 15 fils au centimètre carré, l'écartement des poils du pinceau, la longueur des coups de brosse... tout correspond point par point" à L'Origine du monde.
Ces conclusions scientifiques confirment les intuitions de l'acquéreur : L'Origine du monde et le portrait de Joanna Hiffernan, qui sera inscrit au tome III du Catalogue raisonné que prépare Jean-Jacques Fernier pour l'automne, feraient partie d'une même œuvre. La sulfureuse Origine du monde ne serait donc pas un tableau zoomant sur un sexe de femme, mais une œuvre incomplète faisant partie d'un portrait plus large. Reste encore à trouver les autres pièces manquantes de ce mystérieux puzzle.
Mise à jour, 19 h 20  : D'autres experts se montrent sceptiques quant aux affirmations de Paris-Match. Le site L'Atelier des icônes soulève que "le mouvement du buste, tourné vers la gauche, ou celui du drapé paraissent incompatibles avec la position de la jeune femme du portrait". Dans la Tribune de l'art, Didier Rykner regrette que Jean-Jacques Fernier, "expert effectivement reconnu de l'artiste, puisse faire preuve d'une telle légèreté" en validant l'analyse scientifique du tableau comme preuve. Le Musée d'Orsay, lui, n'a pas commenté les informations de Paris-Match.



Le Monde: http://bigbrowser.blog.lemonde.fr/2013/02/07/tresor-lorigine-du-monde-aurait-un-visage/